Deux de nos camarades sont tragiquement décédés au cours des derniers mois dans l'exercice de leurs fonctions. Au delà de la douleur qui nous étreint, ces tristes événements nous rappellent la dangerosité de notre métier au service de nous-mêmes. Par deux fois, nos camarades sont tombés sous les balles de bijoutiers, alors qu'ils ne faisaient que leur métier. Ce sont deux fois de trop.
Nous condamnons fermement cette nouvelle forme de délinquance commerçante, qui porte atteinte à notre droit d'exercer notre profession dans des conditions de sécurité décente. Nos conditions de travail sont devenues inacceptables, et il ne fait aucun doute que la dégradation de notre environnement sécuritaire global s'incrit dans une stratégie de mise en place d'un climat de stigmatisation de la profession de braqueur, climat nauséabond qui ne va pas sans rappeler les heures les plus sombres de notre histoire. Manifestations de soutien aux commerçants cow-boys soi-disant "victimes" de braquage, pages et pétitions de soutien à ces mêmes commerçants, il s'agit là d'autant d'insultes aux dizaines de milliers de braqueurs qui exercent leur métier avec passion et dévouement, et dont l'ardeur à la tâche devrait même servir de modèle à cette nouvelle génération blasée de tout et intéressée par rien.
Nous tenons aussi à manifester notre mécontentement vis à vis du Président M. Hollande, et plus particulièrement de sa Ministre de la Justice, Madame Taubira, dont les déclarations étaient pourtant porteuses d'espoir: réduction des peines de prison, suppression des peines planchers, peines alternatives, ou même encore aucune peine du tout! Un agenda ambitieux, certes, mais pour lequel nous attendons autant de courage politique de la part du gouvernement que lors des grandes avancées sociétales de notre pays telles que l'abolition de la peine de mort et le mariage pour tous, car nous sommes aussi convaincus que c'est en faisant évoluer les lois que nous ferons évoluer les moeurs au sujet du braquage. Nous attendons donc que ces promesses voient le jour et se traduisent par une amélioration concrête de la vie des professionnels du braquage ainsi que de leurs familles. La plupart d'entre nous ayant grandi dans un environnement où, au quotidien, de nombreux enseignants, sociologues, éducateurs, journalistes et politiciens nous ont bien expliqué que nous étions des victimes de la société, nous ne pouvons accepter de nous faire usurper ce statut par une catégorie de nantis dont nous ne voulons que les biens.
En 2013, nous ne pouvons tolérer d'être considérés comme des délinquants, alors qu'il y a dehors des criminels bien plus dangereux que nous, et qui sont même tout à fait reconnaissables à leur sweatshirt rose avec quatre bonhommes blancs. Il paraît même qu'ils s'assoient en groupe pour lire des textes! Face à cette oisiveté à caractère séditieux, nous, braqueurs, ne pouvons que mettre en avant l'utilité de notre profession pour la société, dans la mesure où, à l'instar du trafic de drogue, le braquage est un des seuls secteurs actuellement en croissance à deux chiffres, bien que ne bénéficiant pas du crédit impôt compétitivité. En période de récession, il fait vivre des milliers de familles, et même des quartiers entiers, et ses professionnels acceptent de travailler sans compter, de nuit comme le weekend, et ce sans la moindre reconnaissance sociale.
Inquiets pour la stabilité de notre pacte républicain, au sein duquel nous sommes convaincus d'avoir toute notre place (nous sommes des victimes je vous ai déjà expliqué!), nous sommons le gouvernement de bien vouloir prendre les mesures suivantes, car il en va de la survie du vivre-ensemble dans notre beau pays:
1) La reconnaissance du métier de braqueur comme une profession "à risque"
2) L'ouverture sans tarder d'un Grenelle du braquage réunissant le gouvernement et tous les partenaires du braquage afin d'échanger sur les solutions nous permettant de braquer en toute sécurité
3) L'interdiction totale des armes à feu pour les citoyens "civils", afin que l'usage de ces armes ne soit réservé qu'aux professionnels
4) L'application avec effet immédiat de la loi pénale de Madame Taubira
5) La mise en place du contrat gagnant-gagnant prévoyant la souscription d'assurance obligatoire pour les commerçants afin que ce soit l'assureur (un autre VRAI délinquant) qui paie en fin de compte
6) La prise en charge de nos familles par l'Etat en cas d'accident professionnel.
Nous sommes convaincus que c'est en sensibilisant l'opinion publique sur la réalité que ous vivons que nous obtiendrons gain de cause. En effet, aujourd'hui, nous craignons pour nos vies, nos familles, mais aussi pour l'avenir de notre filière et de notre savoir-faire. Car d'après nous, il est primordial que la France arrive à rester pionnière dans ce domaine, où elle excelle depuis longtemps.